Présentation
Ce dictionnaire s’est fixé un objectif -simple- en apparence : offrir sous une forme aussi neutre et concise que possible, un répertoire des écrivains bretons du 20ème siècle. Même énoncé de cette manière, le projet a pourtant soulevé un certain nombre de questions auxquelles il a fallu donner des réponses, souvent partielles et nécessairement provisoires…
Que faut-il entendre tout d’abord par le mot écrivain ? ce terme générique se rapporte ici au champ de la littérature écrite dans ce qui fait sa spécificité : la création esthétique. Sont donc reconnus comme écrivains, les romanciers, poètes et auteurs dramatiques, à l’exclusion de toute autre forme d’expression, ce qui renvoie par ailleurs à l’opposition bien connue, introduite par Roland Barthes, entre » écrivains « , dont le travail relève d’une démarche artistique et » écrivants « , dont la pratique est plutôt celle du commentaire. Si l’accent est mis sur les trois genres littéraires traditionnels, au détriment de l’essai, sociologique ou historique, par exemple, ce dictionnaire n’est pas, pour autant, un ouvrage de critique ni d’analyse. Sa visée étant purement informative, nous avons considéré comme écrivains tous ceux qui ont publié au moins une oeuvre, romanesque, poétique ou dramatique, en nous interdisant tout jugement quant à la valeur même de l’écriture. Se côtoient donc dans ce dictionnaire des auteurs débutants ou inconnus du grand public et des écrivains de renommée internationale comme Max Jacob, Per Jakez Hélias, Guillevic ou Alain Robbe-Grillet…
La seconde question est de taille : qu’est-ce qu’un écrivain breton ? problème fréquemment soulevé, surtout lorsqu’il s’agit de la littérature bretonne de langue française. Encore une fois, nous n’avons pas voulu ici théoriser une notion qui reste matière à débat. Le choix des écrivains qui figurent dans ce dictionnaire obéit à un parti-pris collectif que l’on peut formuler de la manière suivante :
Sont désignés comme écrivains bretons, quelle que soit leur langue d’écriture (breton ou français), tous ceux qui sont nés en Bretagne, même si leur œuvre littéraire est sans rapport avec cette région ou avec sa culture. Car il y aurait beaucoup à dire sur la présence en creux de la Bretagne dans l’œuvre d’écrivains qui ne s’y réfèrent pas explicitement, comme Victor Segalen par exemple, de même qu’il y aurait beaucoup à dire sur la Bretagne en excès chez certains auteurs où le cliché devient la forme faible et dégradée de l’authenticité…Nous n’avons pas voulu entrer ici dans cette problématique.
Par contre, soucieux d’offrir de la Bretagne une image ouverte, nous avons choisi de faire figurer également, dans ce dictionnaire, des écrivains qui n’y sont pas nés, mais qui l’ont choisie comme lieu de résidence, voire comme terre d’adoption ou qui en ont fait la matière de leurs œuvres. Difficile d’écarter du champ littéraire breton le Marseillais Saint-Pol-Roux qui a tant marqué Camaret, Georges Perros, le Parisien de Douarnenez, ou l’Ecossais Kenneth White qui a fait de Trébeurden le point fixe de son nomadisme celtique…A l’image de la Bretagne plurielle que nous revendiquons ce dictionnaire est un lieu d’accueil où se croisent ceux qui ont choisi de vivre et d’écrire au pays, ceux qui en sont partis, à la conquête du dehors ou de l’ailleurs, comme ceux, venus de l’extérieur, qui en ont fait leur territoire d’écriture.
Enfin, si l’objectif d’un tel travail reste l’exhaustivité, nous n’avons pas la naïveté de croire qu’il est ici totalement réalisé. Il existe certainement des noms qui ont échappé à nos recherches, de même que certaines notices demeurent notoirement incomplètes. Pour faire de ce dictionnaire un livre de référence aisément manipulable, nous avons choisi de rédiger des notices courtes en sélectionnant, sauf cas particuliers, un échantillonnage de 5 titres. Mais, il arrive parfois que des informations manquent : dates ou lieux de naissance, de décès, références éditoriales…De même, malgré le travail de recoupement des sources auquel nous nous sommes livrés, nous savons n’être pas à l’abri d’erreurs ou d’omissions. C’est pourquoi il convient de considérer ce travail comme un chantier qui sera mis en ligne, dès que possible, sur le site du laboratoire qui l’a conçu (http://www.celicif.fr.fm) et une équipe sera chargée de le mettre à jour et de le compléter, au fur et à mesure des informations qui nous parviendront :
- soit à l’adresse du laboratoire : CELICIF (Centre d’Etude des Littératures et Civilisations Francophones), Département des lettres, Université Rennes 2-Haute Bretagne, 6 avenue Gaston Berger, 35043 Rennes Cedex
- soit à l’adresse électronique : celicif@uhb.fr
À terme, nous espérons réaliser ainsi un site évolutif aussi complet que possible consacré à la littérature bretonne.
Car ce dictionnaire reste avant tout le travail collectif d’une équipe de chercheurs et d’enseignants-chercheurs, fédérés par le CELICIF, qui s’intéressent au patrimoine culturel de la Bretagne. Tel qu’il se présente aujourd’hui, il a le mérite d’offrir un répertoire commode pour une référence rapide qui ne dispense pas pour autant d’une recherche plus approfondie, mais il permet aussi de se faire une idée de la richesse et de la diversité de la création littéraire en Bretagne sur l’ensemble du 20ème siècle : de la littérature de jeunesse au roman policier en passant par le théâtre populaire, la poésie post-symboliste, les écritures militantes ou les expériences d’avant-garde. On y découvre également la vitalité de l’édition bretonne qu’elle soit en langue française (Calligrammes, Blanc-Silex, Bargain, Liv’Editions, Folle Avoine, Terre de Brume, Diabase, Traces, A Contre-Silence, le Petit Véhicule…) ou en langue bretonne (Al Liamm, An Amzer, Brud Nevez, An Here, Mouladurioù Hor Yezh, Skrid…). Ainsi conçu, ce répertoire peut donc apparaître comme une étape préliminaire aux grandes questions que pose aujourd’hui, dans son ensemble, la littérature bretonne.
Marc Gontard